Méditation du Petit Journal de Sainte Faustine – 18 fév. 2022

Voici ce qu’écrit soeur Faustine à l’intention de son père spirituel en février 1935 :

« Celui qui sait pardonner se prépare beaucoup de grâces divines. Chaque fois que je regarderai la croix, je pardonnerai avec sincérité. » (PJ 390)

 

Méditation :

Pardonner, c’est avoir un amour renouvelé pour l’autre, un regard nouveau sur lui, un regard épuré, libéré et libérateur.

Quand on a à pardonner, on se situe souvent au-dessus de l’autre parce que, en quelque sorte, on condescend à lui accorder notre pardon. Nous croyons avoir le pouvoir de pardonner ou de ne pas pardonner. Nous calculons la dette de l’autre, notre intérêt, son intérêt, éventuellement l’intérêt général. Nous imaginons des dommages de guerre, nous élaborons des conditions d’armistice. Pas facile de mettre fin aux Grandes Guerres.

Mais Jésus nous montre exactement le contraire de cette démarche de négociation entre nous et l’autre. Vu de la Croix, l’autre est toujours le prochain. Jésus exige de nous que nous devenions miséricordieux, que nous quittions notre uniforme de maréchal pour revêtir le vêtement du service. Du service de Dieu. Pardonner est parfois si difficile que nous nous en sentons incapables. C’est pourtant une attitude fondamentale du chrétien et c’est une exigence douloureuse. Et si nous nous en sentons incapables, nous devons nous tourner vers le Seigneur de qui nous tenons notre force d’agir, de penser et d’être. Nous serons alors pour l’autre l’instrument du pardon qui vient de Dieu.

« Et vous tous, écrit saint Pierre à tous les chrétiens du monde, les uns envers les autres, prenez l’humilité comme tenue de service. Dieu en effet s’oppose aux orgueilleux, aux humbles il accorde sa grâce. Abaissez-vous donc sous la main puissante de Dieu pour qu’il vous élève en temps voulu. » Le pardon est un service que nous rendons de la part de Dieu à celui qui nous a offensés. Le chrétien peut ainsi dépasser la dimension psychologique, sentimentale, émotionnelle, pour s’en remettre totalement à Dieu, dans la confiance que tous vont y gagner et ne rien y perdre, et que Dieu se chargera de résoudre ce qui oppose, ce qui gêne, ce qui empoisonne nos vies. Ce pardon, puisqu’il est don de Dieu, devient alors absolument inconditionnel et irrévocable, comme tout ce que Dieu fait. Le Seigneur dispense la grâce extraordinaire de faire jaillir sur les hommes de bonne volonté la paix et la joie intérieure, avec tous leurs fruits.

Dans ces tentations pesantes de la rancune et de la vanité, savoir pardonner, c’est donc savoir se tourner vers le Crucifié, qui nous montre le chemin le plus sublime de l’humilité : lorsqu’il est sur la Croix, ce n’est pas Jésus qui accorde le pardon, mais il demande à son Père d’accorder que tous les péchés de l’humanité soient enlevés à cause de son acte d’abandon total. Si Jésus rachète tout dans son sacrifice volontaire en se soumettant à la haine des hommes, comment ne me tournerais-je pas, moi, vers Lui qui est transpercé pour mes propres fautes ? Comment ne pas lui demander de me pardonner mes élans d’orgueil, qui me tiennent encore éloigné de mon prochain et de Dieu lui-même ? Demandons la grâce de faire un véritable acte d’abandon, surtout dans les situations les plus tendues : « Seigneur, que ta volonté soit faite, je te confie toute cette affaire. A toi d’y penser pour moi, et je serai l’instrument de ta miséricorde.»

Jésus a dit à sainte Faustine que son regard sur le Tableau de la Miséricorde est celui qu’il avait du haut de la Croix. Demandons la grâce de plonger nos yeux dans les yeux de celui qui nous a offensés et d’avoir pour lui ce regard d’amour que le Seigneur crucifié avait sur nous.

fr. Pierre Sokol et Isabelle Kamaroudis
relecture par le Père Dominique Aubert